Chit-Chat Grand jeu du printemps MobileRead – Liseuses et chèques cadeaux

[Rock Lobster]

Je quittai la cage aux folles et jetai un regard sévère à Zippy. « Quelque chose que vous voulez me dire, poupée? »

« Ben, y’a ce mécanisme de disjonction temporelle que certains membres ont testés il y a quelque temps. Ou dans quelque temps? M'enfin, quand vous parliez à Patricia, je me suis éclipsée pour aller plus avant dans le temps et j’ai commencé à nettoyer un peu. On fait un apéro la semaine prochaine et j’ai cru que ça serait bien de prendre de l’avance. Des trucs genre un cadavre au milieu du plancher, ça peut perturber les invités grave. J’ai peut-être gaffé. »

« J’imagine qu’avoir une scène de crime propre, c’est essentiel dans la vie. Vous avez fait quoi, exactement? »

« Ben, la pince-monseigneur traînait là, toute dégoulinante, alors je l’ai essuyée, puis je l’ai remise sur le plancher. J’allais trouver un endroit pour la ranger, mais vous êtes sorti de la chambre de Patricia et j’ai dû revenir ici dare-dare. »

Je m’occupai à rayer de mon calepin les références aux cordes, et à dessiner des ronds zonzons autour du nom de Zippy et du récit du nettoyage de l’arme.

« Allez, qu’on en finisse! »

La dernière porte était marquée « PilotBob ». Quand je l’ai ouverte, j’ai vu un pingouin fringué d’un smoking et d’un haut-de-forme. Il déplaçait un paquet d’étiquettes magnétiques sur un tableau blanc.

« Bande d’ornithorynques !! Grotesques nyctalopes !! Bougres de jocrisses !! Sacré tonnère !! » dit-il.

« Y’a un problème ici, Pengy ? »

« Saleté de refonte de forum! Y’a pas moyen que tout le monde soit content! Vous n’avez aucune idée des heures que j’y ai passées pour que tout soit parfait! »

« C’est quoi, le pépin? »

« Tout le monde veut que le design soit simple et élégant, mais en même temps qu’il laisse de la place à toutes les liseuses jamais créées avec toutes leurs fonctions uniques et jusqu’au moindre hack ou écran de veille personnalisé. Impossible! J’ai presqu’envie de tout balancer dans un seul forum que j’appellerais « divers » ! »

« Est-ce que pshrynk était un des grands râleurs ? » J’ai demandé, me disant que la chance allait peut-être enfin tourner dans cette mascarade.

« Il était énervant, mais il ne me mettait pas vraiment des bâtons dans les roues. Il se préoccupait plus de savoir que les gens lui règleraient leurs factures qu’autre chose. »

« Dîtes donc. Le ‘mtravellerh’. Il me paraît louche. Il raconte beaucoup de bobards ? »

« MTH ? Mentir ? Ça m’étonnerait très fort. Disons qu’il lui manque… l’imagination nécessaire. »

« Y’a des gens ici qui disent que vous avez vu tout ce qui s’est passé dans la Suite. Qu’est-ce que vous pouvez me raconter sur ce qui s’est passé pendant le massacre ? »

« Ben, Zelda faisait la sieste dans un coin, mais est aussi apparue plus tard par transpositionnement temporel. J’peux pas dire que j’aie vraiment jamais utilisé ce genre de truc. Nate courrait partout en mettant de la corde sur tout. Patricia était dans un coin, l’air un peu à l’ouest. Verencat suivait Nate en se jetant sur la corde, ce qui emmerdait Nate. Dale notait tout pour le Wiki. Ravenne était en train de graffer un petit chien gris avec une bombe de peinture. NatCh était à quatre pattes par terre à chercher sa rate. MTH polissait les casiers des prix, et pshrynk se plaignait de ne pas avoir une nouvelle liseuse gratuite. Mais j’étais plutôt distrait par Netseeker qui essayait de se confesser d’un truc et le PUTAIN DE REDESIGN ! Quoi encore ? » Il décrocha un téléphone rouge et se mit à jacter à un dénommé ‘Grimaud’.

Je sortis de la pièce et feuilletai mes notes. Il y avait un truc qui manquait, mais quoi? Je dessinai quelques flèches de plus, liant les points principaux en me torturant le poireau.

Tout d’un coup ça m’a frappé ! J’ai regardé Zippy et dit : « Ramène tout le monde ici ! On a besoin d’une petite conversation ! »

[Rock Lobster]

Je me retirai dans un coin et feuilletai mon calepin. La solution était là quelque part, il fallait juste la tirer au clair. Qui avait un motif? Qui avait les moyens? Allais-je être payé à temps? Toutes les questions de base, pour un privé.

J’ai tapoté à quelques endroits et j’ai écouté le stylo me repasser des entretiens. Puis quelques autres. Je l’avais sur le bout du cerveau, mais ça m’échappait encore. Je tapotai de nouveau et écoutai un morceau particulier.

Et je l’ai eu ! Ces dingues se croyaient malins, mais ça nourrit pas son homme, d’être malin. Je me retournai vers Zippy et dis : « Ramène-les tous ici, petite. J’ai un dénouement à présenter. »

Zippy retourna au gros bouton rouge pour lui flanquer une grande claque. Les murs ont refait leur petit jeu de pliage-dépliage et les modérateurs apparurent au même endroit. Sauf Netseeker, évidemment, trop occupé à taper ses confessions dans un coin.

Je fourrageai dans les manières d’aborder le sujet et j’ai fini par décider que l’approche classique est classique pour une raison.

« J’imagine que vous vous demandez pourquoi je vous ai fait venir ici… » j’ai commencé. Un tollé d’interruption s’est élevé, on se serait crû dans une cour de récré à 11h.

« Ben voyons, pour nous dire qui est le meurtrier! »

« Pourriez-vous me tenir ce fil électrique un moment? »

« Un dénouement est la dernière étape d’une histoire, là où le mystère est résolu. Il commence généralement par la phrase « J’imagine que vous vous demandez pourquoi je vous ai fait venir ici, » ou une variante de celle-ci [ref. nécessaire] »

« Je crois qu’on devrait le laisser parler, non? »

« Qui a piqué ma bombe de peinture ? »

« Boudi, ce que je donnerais pour une sieste là ! »

« Y’a quelqu’un qui a vu ma rate rebondir dans l’coin? »

« Je crois que vous allez trouver que l’auteur présumé du crime était bien l’un d’entre nous, mais vos pauvres conjectures seront bien loin du but. »

« Quelqu’un veut acheter un t-shirt avec « Lobster Rocks! » dessus? »

« Du fil! Du fil! Donnez-moi du fil! »

« Je l’ai fait. Voici ma confession, gentiment tapé en douze pages sans interlignes, écrite avec mon efficacité teutonne habituelle. »

« SILENCE! » Hurlai-je. Cette bande tapa finalement sur mon dernier nerf, et je savais n’avoir aucun remplacement à espérer du courrier du lendemain. Ils cessèrent de bavasser et me regardèrent.

« Pas besoin de crier, » marmona Nekokami.

Je lui lançai un regard furieux et elle se tût. « Maintenant, avant que je commence, y’a quelqu’un qui veut passer à confesse? Non, pas vous, Netseeker. »

Apparemment personne ne voulu saisir l’occasion. Pas étonnant. Les roublards pensent toujours qu’ils peuvent s’en sortir jusqu’à ce qu’un gentil monsieur en chemise bleu leur colle les bracelets.

« Bien sûr que non, ça serait trop facile. Bon, tant pis pour vous, on y va. D’abord, on a le meurtre. Assez simple, le raide est toujours là. Facile à observer, même pour les privés qui yoyotent du tuyau.

« Deuxièmement, on a l’arme du crime qui traîne à côté du macchab’, mais elle est propre. Ça m’a posé problème jusqu’à ce que je découvre qu’il y a des fluctuations temporelles ici. Plus de problème, donc. Notre insomniaque chronique et femme de ménage dévouée a trébuché dessus pendant que, somnambule, elle errait hors synchronisation temporelle. Ça explique l’absence de sang sur la pince-monseigneur.

« Troisièmement, cette pince-monseigneur justement. Qu’est-ce qu’elle fichait dans la pièce pour commencer ? J’ai dû bien regarder le mort pour trouver la réponse à ça. Il était du genre à aimer les nouveaux jouets, mais à les vouloir gratuitement. Il arrachait la boîte du mur pour en piquer un quand le meurtrier l’a surpris.

« Quatrièmement, Il y a le fil électrique bleu qui traîne partout. (Assis, Verencat!) J’ai planché là-dessus pendant un moment, jusqu’à ce que je découvre la théorie des cordes. Et un paquet d’autres théories. Une fausse piste.

« Cinquièmement, il y avait le fait que vous vous trouviez tous ici, mais que personne n’avait vu le meurtre. Comment expliquer ça? Étiez-vous tous coupable? »

J’observai l’équipe bigarrée des modérateurs et pris une pause pour l’effet.

[Rock Lobster]

Au cas où il y en a qui suivent, je vais vous dire un truc : c'est une bande de sacrés rigolos, mais écoutez bien ce qu'ils racontent, et vous verrez qu'il y en a un qui se prend les pieds dans son histoire...

[Rock Lobster]

C’était des coriaces, je peux vous le dire. Personne n’a même sourcillé. Même pas celui que je savais être le meurtrier. Celui qui s’était confessé sans même s’en rendre compte.

« Enfin, il y a le nook et l’étoile jaune que feu Môssieu pshrynk serrait dans ses mains. C’était quoi? Est-ce que ça avait seulement une signification?

« Oui et non. L’étoile allait trouver place dans la boîte brisée, pour que vous soupçonniez pshrynk, qui pourrait alors plaider qu’il n’était pas assez stupide pour mettre un de ses propres avatars sur la scène du crime. » Ils acquiescèrent tous. Cette bande était tordue comme un tire-bouchon dans une tornade. Ça m’avait pris à moi quelques minutes à suer du cerveau avant de comprendre ce détail.

« Finalement, il y avait le nook. Il appartenait au tueur. Il avait découvert pshrynk qui arrachait la boîte du mur et s’est avancé pour l’arrêter. Dans la bagarre qui a suivi, la pince-monseigneur s’est retrouvée plutôt près du crâne de pshrynk. À trois reprises, pour faire bonne mesure, donc on peut oublier la théorie de l’accident. »

Le tueur commençait à se tortiller. J’adore quand ça arrive.

« Donc, le tueur est l’un d’entre vous qui a, ou plutôt avait, un nook. N’est-ce pas, Nate? »

« Plusieurs ont un nook. Vous ne pouvez pas m’accuser d’un crime juste parce que j’ai un exemplaire de chaque liseuse qui a jamais été faite! » Je dois lui accorder qu’il réussissait très bien à prendre l’air outré et innocent à la fois.

« C’est vrai, mais il n’y en a qu’un qui a avoué juste ici dans ce petit micro. » Je levai le stylo.

« Pas vrai, mtravellerh? »

Son visage habituellement ténébreux afficha le choc. Il se reprit rapidement. « Je n’ai pas avoué. Je me souviens précisément de chaque détail de notre conversation. »

« Non ? » Je tapai sur mon calepin et fit passer la voix de mtravellerh lorsqu’il disait « Non, je dois déclarer que je n’ai pas vu qui a commis ce crime atroce, je suis catégorique là-dessus. » Ils en eurent le souffle coupé tous.

« Vous ne pouvez pas vous voir vous-même faire quelque chose, n’est-ce pas, MTH? Être doué avec les mots n’est qu’un talent. Être doué à l’écoute en est un autre. Appelez les flic, Zippy, vous avez votre homme! »