Je reviens des Utopiales, l'équivalant d'Angoulême pour la science-fiction. Comme pour les années précédentes, j'y participais en tant que journaliste et écrivain. Cette année, je portais une troisième casquette, celle d'éditeur, puisque je viens de lancer une petite maison d'édition, Le Songe des Murènes, qui vient de publier son premier titre, Le Passe Rêve, qui réunit quelques-uns de mes textes courts. (Textes que vous pouvez lire également sur Feedbooks).
Pour cette édition des Utopiales, la manifestation tournait autour des réseaux, et il y a été bien sûr question du livre électronique. Quel sera son impact sur la littérature, et surtout sur le livre papier ? Il semble certain que l'ebook, et surtout le développement des lecteurs mobiles, amènera une baisse des ventes de l'édition traditionnelle. Comme ça n'amènera pas plus de lecteurs, comment l'édition évoluera-t-elle face à ces changements ?
Il est évident que ce sont ces changements et les transformations qui s'annoncent dans la chaine du livre qui provoquent la frilosité des éditeurs face au livre électronique.
Pour le moment le milieu de l'édition et de la librairie est dans une phase d'interrogation. Il ne fait pas de doute que les librairies physiques sont condamnées à disparaître à plus ou moins long terme. À Lyon, L'Ultime Razzia vient de fermer ses portes et d'autres librairies vont sans doute suivre. De mon côté, en tant que libraire-bouquiniste, rien que pour cette année, j'ai vu une baisse du chiffre d'au moins 30%. Or, d'après les chiffres de l'édition, la vente en ligne ne compense pas cette baisse de vente dans les librairies.
Les premiers touchés sont les auteurs. Moins de ventes, donc moins de droits. En France beaucoup d'auteurs ont un autre métier (prof, journaliste, traducteur), car il est difficile de vivre de sa plume.
Sans doute que l'ebook amènera de nouvelles façons de lire. De nouvelles façons d'aborder la chose littéraire. Sans livres papier plus de collectionneurs, plus de dédicaces, sans doute plus de festivals consacrés aux livres et aux auteurs.
Voilà quelques pistes ouvertes lors de ces Utopiales. Certaines à travers des conférences débats, d'autres au travers de discussions personnelles avec des écrivains, des journalistes et des professionnels du livre.
Beaucoup se sont montrés intéressés par l'expérience que constitue Feedbooks, que j'ai racontée de long en large.
Mes propos sur l'avenir du livre papier peuvent paraître pessimistes, mais ils reflètent une réalité basée sur des chiffres. Dans un premier temps, l'édition va subir de profondes métamorphoses.
Il y a 10 ans un livre devait faire 500 000 exemplaires pour être considéré comme un best-seller. Aujourd'hui un ouvrage qui atteint 100 000 c'est déjà exceptionnel. On va vers de nouvelles formes d'édition pour le livre papier. Ce qu'on appelle en particulier la micro édition. C'est cette forme de publication que j'ai choisie pour Le Songe des Murènes. Du livre à 500 exemplaires rentabilisé avec 200 ventes, sans réseaux de distribution trop lourds. C'est tout à fait réalisable. Par contre ça demande beaucoup plus de boulot de la part de l'éditeur. Peu de parutions (pour ma part 4 par an) pour pouvoir suivre le livre et le faire vivre. Tous comme la plupart des auteurs, les nouveaux éditeurs devront aussi avoir un second boulot à côté pour pouvoir bouffer. Mais ça c'est encore une autre histoire.