Sur l'écran de télévision apparaît le républicain John McCain, qui savoure sa victoire le soir de l'élection présidentielle du 4 novembre. " McCain vainqueur, dit le titre. La participation a été moins élevée que prévu. " C'est avec cette image de fiction choc que la campagne de Barack Obama dans le Colorado a tenté de mobiliser les militants, deux jours avant la clôture des inscriptions sur les listes électorales, lundi 6 octobre. Tout le week-end, les démocrates ont prévu des manifestations pour maximiser la participation.
Comme dans le Colorado, les inscriptions sur les listes s'achèvent le 6 octobre dans la plupart des Etats en balance (swing states). A l'approche de la date-limite, l'état-major du candidat démocrate a intensifié les efforts de recrutement. Pour M. Obama, la participation est un élément crucial. Depuis la fin des primaires, il parie sur l'augmentation du nombre d'électeurs, notamment chez les Noirs, les jeunes et les Hispaniques pour dépasser le score de George Bush en 2004 dans les Etats-clés.
Le camp Obama a recours à toutes sortes d'initiatives pour cibler les différentes catégories d'électeurs. " Fiestas pour Obama " dans les restaurants latinos ; navettes pour conduire les sans-abri au centre où ils peuvent s'inscrire et voter le même jour (on vote déjà dans l'Ohio). Et concerts dans les universités. Bruce Springsteen, qui a fait campagne avec John Kerry en 2004 mais n'a pas encore joué pour Barack Obama, a prévu de se produire, dimanche, à l'Ohio State University, où les démocrates convoitent les votes des 52 000 étudiants.
Les sondages attribuent à Barack Obama une avance significative sur John McCain (49 % contre 42 %, selon le Pew Research Center), ce n'était pas arrivé depuis juin. Surtout, M. Obama s'est détaché dans des Etats-clés comme la Floride ou la Virginie, selon la moyenne des sondages faite par le site Realclearpolicics.com. Effet Palin à rebours ? Pour Time Magazine, les femmes ont basculé en faveur de Barack Obama (55 % contre 38 % pour John McCain), alors qu'il n'avait qu'un point d'avance dans cette catégorie après la convention républicaine.
La crise financière a fait le jeu de M. Obama, mais ce résultat est aussi le fruit de l'organisation quasi militaire mise en place par David Plouffe, le directeur stratégique. Chaque Etat fait l'objet d'une tactique sur mesure. Bill Clinton, l'ancien président, a été délégué en Floride, où les retraités s'inquiètent de la dévaluation de leurs portefeuilles. Joe Biden est l'envoyé spécial auprès des cols bleus de Pennsylvanie et de l'Ohio. Bill Richardson s'efforce de mobiliser les trois Etats de l'Ouest (Colorado, Nevada et Nouveau-Mexique, 19 délégués au total) sur lesquels Barack Obama compte pour contre-balancer la perte éventuelle de l'Ohio (20 délégués).
John McCain a admis, jeudi, qu'il abandonnait ses efforts dans le Michigan, pour se concentrer ailleurs. Il se retrouve devoir se défendre dans des Etats où il devançait systématiquement le sénateur démocrate, comme l'Indiana, et le Colorado, qui n'a pas voté démocrate à l'élection présidentielle depuis 1992. Après les Obama en début de semaine (Barack et Michelle y sont venus à deux jours d'intervalle), John McCain a passé jeudi et vendredi dans le Colorado, et Sarah Palin y tenait une collecte de fonds samedi. La campagne y est déjà dans la dernière ligne droite : un tiers des électeurs ont demandé des bulletins de vote par correspondance, ou prévoient de profiter du vote anticipé.
A Denver, M. McCain s'est adressé jeudi à une audience quasi exclusivement féminine. Une électrice, impatiente, lui a demandé quand il comptait " enlever les gants " et descendre dans l'arène. " Pourquoi pas mardi soir ? ", a-t-il répliqué, faisant référence à la date du prochain débat télévisé. Selon le Washington Post, le camp républicain compte repasser à l'attaque, maintenant que le plan de stabilisation financière est voté. Les attaques devraient porter sur le passé de M. Obama à Chicago, ses liens avec le promoteur Tony Rezko et l'ex-révolutionnaire des années 1960 William Ayres.
Corine Lesnes