Profitant de la visite en Russie du premier ministre ukrainien, Vladimir Poutine a vivement attaqué le président pro-occidental
Afin d'éviter une " guerre du gaz " comme celle qui avait fait rage, en janvier 2006, entre Moscou et Kiev, le premier ministre ukrainien Ioulia Timochenko et son homologue russe Vladimir Poutine ont signé, jeudi 2 octobre à Moscou, un protocole d'accord. " Les parties ont confirmé leur volonté de passer graduellement, en trois ans, à des prix de marché ", a indiqué Mme Timochenko, à l'issue d'une rencontre avec M. Poutine dans sa résidence de Novo-Ogarevo, près de Moscou.
Pourtant le document signé ne mentionne pas de prix. Jusqu'ici l'Ukraine payait le gaz russe à un tarif préférentiel (179,50 dollars les 1 000 m3). Depuis quelque temps, la Russie lui promet un " prix européen ", soit 500 dollars, parce que les pays producteurs d'Asie centrale ont augmenté les tarifs (150 dollars les 1 000 m3 en moyenne) du gaz qu'ils revendent au monopole Gazprom.
En venant à Moscou, le premier ministre d'Ukraine espérait obtenir un échéancier précis, elle est repartie les mains vides.
Un accord de principe a toutefois été trouvé en vue de l'éviction de l'intermédiaire RosUkrenergo, une société mixte opaque sise dans le canton de Zug en Suisse. Détenue à 50 % par Gazprom, RosUkrenergo encaisse les paiements offshore du gaz en faveur de prête-noms intervenant pour Gazprom et pour des bénéficiaires ukrainiens proches du pouvoir. A partir du 1er janvier 2009, l'achat du gaz sera négocié " directement " par la société gazière ukrainienne Naftogaz et le géant gazier russe Gazprom, a précisé Mme Timochenko.
La visite de cette dernière intervient sur fond de confusion politique en Ukraine. Le parti du président Viktor Iouchtchenko, qui formait une majorité pro-occidentale avec le bloc du premier ministre, l'a quittée en septembre. Des négociations sont en cours entre les anciens partenaires pour reconstituer leur alliance, sans résultats. Si la situation perdure, le président du Parlement devra le dissoudre et annoncer la tenue de législatives anticipées.
Evoquant " l'incertitude politique " qui règne à Kiev, Vladimir Poutine s'est interrogé sur la validité des accords signés : " on peut se demander ce qu'ils deviendront demain ". Envenimées par la crise géorgienne d'août, les relations russo-ukrainiennes sont au plus bas. Dans l'attente d'un changement de pouvoir à Kiev (une présidentielle est prévue en 2009), Moscou mise sur Ioulia Timochenko et tire à boulets rouges sur le président Iouchtchenko, qualifié jeudi de " fripouille " par Vladimir Poutine.
Le premier ministre russe a accusé au passage l'Ukraine d'avoir livré des armes à la Géorgie pendant le conflit du mois d'août, un " crime " selon lui. Le jour de l'arrivée de Mme Timochenko à Moscou, le quotidien Izvestia a publié une enquête sur le soutien militaire de l'Ukraine à la Géorgie. " Nous avons désormais les documents prouvant que Iouchtchenko s'est allié au président géorgien - Mikheïl Saakachvili - en vue du génocide contre le peuple ossète du sud ", conclut le journal.
Marie Jégo.