Le film détonant " Being W. " dépeint un président américain dont les multiples gaffes cachent un incroyable cynisme
IL Y A DEUX ANS, le duo s'était amusé à se mettre dans la peau de Jacques Chirac. Cette fois, un peu selon le même principe, Karl Zéro et Michel Royer se sont attelés à une tâche autrement plus lointaine et plus complexe : tenter de se mettre à la place, à l'intérieur de George W. Bush lui-même, président des Etats-Unis et à ce titre un peu maître du monde.
Le résultat est un film détonant, Being W. (que l'on peut traduire par " Dans la peau de W. "), coproduit par Canal+ et Arte (les deux chaînes le diffusent successivement), qui se veut une autobiographie non autorisée du " plus controversé " des présidents américains. Cette fois, les deux réalisateurs n'ont cependant pas pu rester sur le ton badin de la farce et de la gentille moquerie. Il y a certes une voix off - une imitation parfaite signée Jim Meskimen pour la version anglaise, Lambert Wilson pour la version française - posée sur des images d'archives et qui s'exprime à la première personne du singulier.
Il y a encore une succulente sélection de " busheries " - lapsus, gaffes et erreurs en tout genre dont le président américain est coutumier. Ainsi, lors d'une conférence de presse, un journaliste se lève pour poser une question. " Vous n'êtes peut-être pas obligé de garder vos lunettes, il n'y a pas de soleil ici ", dit en substance George Bush, provocateur. Le journaliste est en fait aveugle. Il faut le voir, encore, annoncer qu'il va " restaurer le chaos " ou bien expliquer, sans rire, le très grand flou de la convention de Genève en matière de respect de la dignité humaine.
Mais au fil des images, c'est un tout autre portrait de George Bush qui se dessine en réalité. Derrière la caricature du nigaud gaffeur, se profile un homme beaucoup plus intelligent qu'il n'y paraît, mais surtout incroyablement cynique, parvenu au pouvoir avec des objectifs bien précis, selon les réalisateurs du film, dont notamment l'appropriation des puits de pétrole irakiens. " Au fur et à mesure que l'on avance dans la découverte du personnage, explique ainsi Karl Zéro, on va vers la peur et même l'effroi. "
Peu à peu, le comique s'efface, laissant place à des images de guerre et de morts, des images d'un monde aujourd'hui à la dérive. Un monde qui aura en tout cas beaucoup changé au moment ou George W. Bush remettra les clés de la Maison Blanche à son successeur au mois de janvier prochain.
Olivier Zilbertin
" Being W. ", mardi 7 octobre à 22 h 40 sur Canal+ et mardi 28 octobre à 21 heures sur Arte. Le film sort parallèlement au cinéma le mercredi 8 octobre.