Bien malin qui sait quelle voiture acheter !

Le cofondateur du site Aramisauto regrette l'absence d'une politique claire pour aider à l'achat de véhicules

Depuis plus de vingt ans, choisir une nouvelle voiture était une question de budget… et de capacité à bénéficier de l'une des incitations qui, depuis la " balladurette " jusqu'au " bonus ", nous guidaient vers ce que nous pensions être le bon choix. Bien malin qui sait aujourd'hui quelle voiture acheter ! Les Français attendent des indications claires et craignent de payer les incertitudes d'une transition énergétique complexe.

Source de pollution et de consommation de pétrole, la voiture est aujourd'hui contestée. Les grandes -villes en découragent l'usage et favorisent une mobilité multimodale d'une grande modernité, mais encore souvent à l'état de projet. Désengorgement des centres-villes, coup de frein à la pollution atmosphérique et sonore, reconquête des espaces publics, redécouverte du vélo et de la marche à pied… les politiques de transports urbains ne manquent pas d'arguments.

Mais Paris, Lyon ou Bordeaux ne font pas la France. Quatre-vingts pour cent des ménages possèdent une voiture. Deux tiers de nos compatriotes l'utilisent chaque jour pour aller travailler. En ville comme à la campagne, nous sommes irrémédiablement attachés à une liberté fondamentale rendue possible depuis les années 1950 par la voiture individuelle : le droit de se déplacer quand et où nous le souhaitons. Le temps d'un monde sans automobile est donc encore loin.

Si la transition énergétique bénéficie d'un consensus positif, les étapes et décisions politiques qui l'accom-pagnent et orientent les Français dans leurs choix quotidiens manquent parfois de clarté. C'est particulièrement vrai en ce qui concerne l'automobile. Le conducteur moyen est coincé entre la nécessité de posséder un véhicule et une série d'injonctions et de remontrances. Situation très inconfortable qui complexifie toute décision d'achat, alors qu'une voiture reste en moyenne six ans dans les mains de son propriétaire et représente son deuxième poste de dépenses après son logement.

A quelle sauce fiscale serai-je mangé ? Que vaudra ce véhicule dans cinq ans ? Est-il encore raisonnable d'acheter un moteur thermique ? Est-il déjà temps de passer à l'électrique ? Autant de questions sans réponse aujourd'hui.

Longtemps encouragé par la fiscalité, le diesel a désormais mauvaise presse. Polluant, bruyant, plombé par les épisodes successifs du " dieselgate ", cher à l'achat, ses avantages fiscaux se réduisent et ses ventes ont baissé de près de 5  % en  2017. Dans ces conditions, l'essence retrouve une nouvelle jeunesse (+ 14  % en  2017) et la faveur des Français, mais pour combien de temps ?

Offre électrique faible

La voiture électrique reste encore incapable de satisfaire la plupart des usages. Prix exorbitant, autonomie réduite, lenteur de rechargement, -disponibilité limitée des points de recharge, conséquences sur la production électrique, impacts écologiques des batteries… l'électrique pose encore trop de questions. Malgré les subventions, l'offre reste faible et la part de marché réduite (1,2  % en  2017). Le marché de l'occasion électrique, encore inexistant, ne permet pas d'évaluer un éventuel prix de revente.

Les voitures hybrides peuvent accompagner la transition, mais elles sont encore chères, et l'hydrogène reste pour l'instant une simple perspective à très long terme.

Déboussolés, désorientés, les Français sont perdus. Ils ont besoin d'une feuille de route claire qui leur indique une voie à la fois politique, écologique et fiscale. Les récentes mesures en faveur de la reconversion énergétique sont pragmatiques et opérationnelles. Nous les saluons ! Mais il manque encore des perspectives claires à plus long terme : le diesel est-il voué à disparaître ? Sera-t-il interdit ? Quand ? Quel est le plan à cinq ans, à dix ans ? Quels incitations et bonus ? Quel plan national et quelles déclinaisons locales ?

Ces questions attendent des réponses politiques et techniques à la hauteur de l'enjeu. Nous devons donc agir collectivement pour répondre aux attentes des Français.

par Guillaume Paoli

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