Chit-Chat Grand jeu du printemps MobileRead – Liseuses et chèques cadeaux

[Alexander Turcic]

Avec le son des oiseaux qui pépient et du moteur de la tondeuse du voisin qui vrombit le samedi matin, on peut affirmer avec une certitude quasi absolue que le printemps arrive (*). Maintenant, il faut penser transat, bord de piscine voire l’ombre fraîche d'un arbre. Pensez lectures du printemps. Pensez liseuse toute neuve!

Oui, c’est exact, on a pensé célébrer le printemps avec vous, lecteurs dévoués, en lançant notre grand jeu du printemps! Les prix suivants sont à gagner:

Deux (2) appareils PocketBook 302
Vous pourriez gagner une liseuse PocketBook, avec un écran tactile e-ink 6", 1 Go de mémoire interne, une autonomie de batterie suffisante pour tourner des milliers de pages, avec une connexion bluetooth, et des fonctions de prise de notes, des dictionnaires intégrés et lecture MP3.

Deux (2) appareils Astak EZ Pocket PRO
Vous pourriez gagner une liseuse Astak de la couleur de votre choix (6 couleurs disponibles), avec un écran e-ink 5", particulièrement adapté pour les déplacements en toute légèreté. L’appareil est compatible avec une pléthore de formats d’e-books, l'écran affiche huit niveaux de gris et il propose des fonctions comme la synthèse vocale et une roue de défilement pour tourner les pages ou lire des PDF. Il est livré avec une couverture et des écouteurs pour la fonction mp3.

Vingt (20) chèques cadeaux pour des e-books de Directbooks.com
Vous pourriez gagner un chèque cadeau d’une valeur de 20$ US pour des e-books de Directbooks. Directbooks propose plus de 170 000 titres sans restriction géographique.

Pourriez-vous être l’un des gagnants? Bien sur! Vous n’avez qu’à lire ce qui suit…

Comment ça marche?

Prenez un mystère à la Agatha Christie et ajoutez votre über-pouvoir analytique. La scène du crime : un meurtre commis de sang-froid dans la suite des modérateurs. Votre mission : trouver le meurtrier.

Le détective super-star Rock Lobster (généralement hors-norme, toujours fauché) présentera les chapitres de l’histoire de meurtre dans ce fil. Chaque jour il ajoutera un chapitre, et ce pour les prochains neuf jours. Les deux premiers chapitres seront postés ici-même, dès aujourd'hui, juste après cette annonce. Si vous suivez avec attention l’histoire jusqu’à sa fin, vous pourrez identifier le meurtrier. Une fois identifié, vous n’avez qu’à nous envoyer son nom par courriel au springcontest@mobileread.com avant le 16 mai. N’oubliez surtout pas de nous préciser votre pseudo !

Les détails importants :

• Une seule participation par personne.
• Le grand jeu commence aujourd’hui, le 3 mai 2010, et se termine le 16 mai 2010 à 23:59 EDT.
• La date limite pour nous envoyer votre réponse (nom du meurtrier) est le 16 mai 2010, à 23:59 EDT.
• Vous devez envoyer votre réponse avec votre pseudo à springcontest@mobileread.com. Les réponses envoyées à d'autres adresses mail, et/ou via message privé ou message sur une page profile, ne pourront être prises en compte.
• Parmi les réponses correctes, il y aura un tirage au sort pour les noms de quatre gagnants pour les premiers prix (des liseuses) et 20 gagnants d'un chèque cadeau d’une valeur de 20$ US.

Un très grand merci à PocketBook, Astak et Directbook pour nous avoir fourni les prix!

Bonne chance à tous!

(Comme d'habitude, un grand merci à tous ceux qui en parleront dans leur blog ou sur twitter !)

(*) Pour tous ceux qui vivent dans l’hémisphère sud, vous pouvez garder cette partie pour le mois d’octobre!

Les membre de l’équipe MobileRead ne peuvent pas participer.

[zelda_pinwheel]

Ce fil étant réservé pour l'histoire, je vous invite à venir discuter ici ! Bonne chance à tous.

[Rock Lobster]

J’étais dans mon bureau, faisant de mon mieux pour ne pas entendre le boucan infernal émanant du bureau de Red, au bout du couloir, et épluchant mes comptes avec l’espoir de trouver une bricole que je pourrais facturer à quelqu’un. Faut toujours payer son loyer, il paraît. Que dalle. Il allait falloir passer par la fenêtre jusqu’à la fin du mois pour éviter la main tendue de M Turcic. Je finirai bien par trouver quelque chose quand même, comme d’hab.

Juste quand je sortais le baudrier et la corde pour descendre en rappel, il y a eu un tintement joyeux dans le bureau de devant. J’avais dû me séparer de ma secrétaire le mois précédent, donc j’étais réduit à lorgner par une fente pour vérifier si il y avait quelqu’un que je voudrais voir. Si c’était Red, qui voulait encore des cartouches pour son entraînement de tir sur cible, j’allais lui donner le fond de ma pensée sur la question de décharger son flingue à l’intérieur de l’immeuble.

En l’occurrence, c’était pas quelqu’un que je remettais. Une dame. Tout de noir vêtue, depuis le béret sur sa tête jusqu’aux bottes à talon aiguille en cuir verni à ses pieds. Intéressant.

J’ouvris grand la porte et sortis. « Salut. » j’ai dit, « Je m’appelle Lobster. Rock Lobster, Détective privé. À peu près licencié, et prêt pour l’action. À qui ai-je l’extrême plaisir de m’adresser ? »

« Bonjour, Mister Lobster, » dit-elle, avec un accent français à couper au couteau, « Je m’appelle… Pinwheel. Oui, c’est ça : Zelda Pinwheel. »

C’était donc comme ça, me dis-je dans mon for intérieur. « Bien, Miss ‘Pinwheel’, que puis-je faire pour vous ? Votre légitime saute sa secrétaire, et vous voulez des photos pour le divorce ? »

« Mais non, enfin ! Je ne suis pas mariée. Je cherche quelqu’un de discret pour résoudre un crime affreux ! »

« Si c’est de la discrétion qu’il vous faut, faudrait aller voir Red, au bout du couloir. »

« Il me faut de la discrétion sans faire sauter toutes les preuves, après. »

« Il n’emploie Gaurnim que sur les affaires délicates. »

« On vous a chaudement recommandé et je payerai en liquide. »

Elle avait dû avoir la recommandation d’un ancien client. « Continuez ; ça m’intéresse. »

« Il y a eu un meurtre dans la Suite des Modérateurs. Il faut tirer ça au clair, sinon ça va être la panique. »

« Un meurtre ? ça va douiller, tiens. »

« 300$ par jour plus les frais. »

« Je suis votre homme. Où est le cadavre ? »

Elle roula de gros yeux. « Dans la Suite des Modérateurs ! Vous m’écoutez ou pas ? Il faut suivre, voyons ! »

« J’écoutais, j’écoutais. Je faisais juste pas attention. Je prends mon chapeau, j’enlève le baudrier, et on y va. » J’ajustai mon borsalino à un angle coquet. Quand on est privé, tout est dans l’ambiance.

Tandis que nous passions devant la porte de Mr. Turcic sur la pointe des pieds je me demandais pourquoi tout ce brouhaha. Pourquoi ne pas faire appel aux flics ? Pourquoi cette exigence de discrétion ? Quand est-ce que je verrai ce fichu chèque ? Tous les détails primordiaux, pour un privé. La journée devenait intéressante.

[Rock Lobster]

On est monté dans la tire de ‘Pinwheel’ et on est parti sur la route. Et sur pas mal de trottoirs. Et même sur au moins une terrasse de café.

« Où vous avez appris à conduire ? En Italie ? » J’ai demandé.

« J’ai jamais appris, » elle répliqua.

« Comment ça ? Garez-vous ! Mieux encore, arrêtez là ! » Je tirai sur le frein à main et on pila sec dans un grand crissement de pneus. Bizarrement, nous étions en travers de la route. J’indiquai à ma cliente que nous changions de place et nous sommes repartis. Elle m'indiqua le chemin, et la plupart du temps je suivis ses directions. Elle m’arrêta devant un grand immeuble. L’enseigne affichait une espèce de talkie-walkie monté sur une roue, avec l’indication « MobileRead : Siège International ».

« C’est qui, là, sur le skate ? » j’ai demandé.

« Nous avions organisé un concours, pour lui trouver un nom, une fois. Personne n’a gagné. »

‘Pinwheel’ passa par la grande porte. Il y avait un gibbon à l’accueil.

« Salut, Adrian. » dit-elle. « Il est avec moi. » Le gibbon rangea un flingue qui aurait fait trembler Red dans ses bottes.

« Quelqu’un a déjà réussi à lui passer devant ? » j’ai demandé.

« Pas intact. » Je hochai la tête. C’était forcément quelqu’un à l’intérieur, alors. Je la suivis à travers un dédale de bureaux à cloisons, occupés par des caves trimant avec industrie. À la fin des couloirs on arriva devait une porte luxueuse ; sur le panneau, « Suite des Modérateurs » luisait en lettres d’or. À côté il y avait un clavier d’ordinateur et un petit écran. ‘Pinwheel’ se mit à pianoter dessus comme un enragé. Cela dura un certain temps.

De temps à autre elle lâcha un juron et flanqua une baffe à la boîte. « Fichu IE6 ! » elle grognait. Je n’ai pas bien compris pourquoi il lui a fallu déposer une goutte de sang sur la touche « k ». Enfin, la porte massive céda sur une moquette somptueuse. Une douce musique flottait sur l’air. Miss ‘Pinwheel’ passa le protocole de sécurité et j’entrai dans le saint des saints.

Il y régnait un bordel indescriptible. Contre un mur, une table semblait continuer ad vitam aeternam. Je remarquai qu’il y avait une petite plaque gravée sur le côté : « Y le T » je déchiffrai. Un paquet de types et quelques souris en chapeau vert faisaient le poireau. Par terre il y avait une sacrée pagaille.

« C’était qui, ce type ?” j’ai demandé.

« Son nom est pshrynk. Enfin, était. »

Le cadavre n’était pas beau à voir. Et ce qui lui était arrivé, encore moins. Il avait l’air de s’être bastonné avec plusieurs pinces-monseigneur et au bas mot deux gorilles, et d’avoir perdu.

« Va falloir se donner du mal pour enlever les taches de ce tapis. » j’ai dit.

[Rock Lobster]

Suffit avec les préliminaires. Je m’approchai du refroidi et promenais mon regard un peu partout. Une pince-monseigneur traînait à son côté.

« Bon, y s’est passé quoi ? » j’ai demandé. La bande qui grouillait au fond de la pièce avec leurs chapeaux verts faisait tous mine d'une subite fascination avec le dos de leurs mains.

« On pense que quelqu’un l’aurait frappé plusieurs fois avec une pince-monseigneur, » dit ‘Pinwheel’.

« Sans blague. Quelqu’un l’aurait vu ? »

« Eh bien, pshrynk, évidemment. Et sans doute le meurtrier. À part eux, non. »

Je commençais à trouver que la journée risquait d’être longue. La pince-monseigneur était propre. Soit on l’avait essuyée, soit elle n’était pas l’arme du crime. Bizarre. Sous le macchabée il y avait une pochette noire. Sa main était serrée sur quelque chose. Il avait un petit air étonné. Ça devait pas être comme ça qu’il envisageait de finir sa journée.

Je sortis mon HTC Hero et pris quelques clichés. Il est bien pratique, ce truc. J’ai pas encore trouvé une app de lecture à mettre dessus, mais il tourne sous Android. Stable et fiable.

« C’est qui le proprio ici ? » j’ai demandé.

« Alex Turcic. Un grand nom dans l’industrie. »

« Le même Turcic qui réclame mon loyer chaque mois, que ça me plaise ou non ? »

« Il dit qu’il serait trop heureux de déduire vos loyers impayés de vos honoraires. »

Encore un mois de vaches maigres, je voyais ça d’ici.

Je continuais à fouiner. Contre un mur, un gros bouton rouge marqué d’une pancarte : « Défense d’appuyer ! T'as compris, pshrynk ?! »

« Qu’est-ce qui se passe si on appuie sur le bouton ? » j’ai demandé.

« Des choses étranges. »

« Plus étrange que de se faire descendre à coups de pince-monseigneur ? »

« Pour la plupart. »

Je secouai la tête. Quelle bande de loustics. Je poussai le corps un peu du pied, et ramassai la pochette noire. À l’intérieur il y avait une de ces liseuses dont on parlait tant. En haut, je lisais « nook ». Drôle de nom. Le verre de l’écran était fracturé. Dans le coin, à peine lisible, je déchiffrai « Moby Dick ». Clic, une photo.

Desserrant la main, je trouvai un papelard jaunâtre en forme d'étoile avec une lettre « Q » en rouge. Une autre photo.

« Est-ce que c’est une bonne idée de perturber le lieu du crime comme ça ? » demanda l’un des Galurins Verts. Il avait l’air d’un gros oiseau aux yeux protubérants.

« Si les gars de la Police Scientifique finissent par arriver, ils auront qu’à faire l’inventaire de mes traces et les classer sous ‘complicité.’ Ça, ou alors sous ‘ce fichu Lobster fait encore des siennes’. J’ai vu ce dossier, figurez-vous. Et vous êtes ? »

« Je suis Nate the Great. »

« Bien sûr. »

Mademoiselle ‘Pinwheel’ se pointa pour signaler, « Il est dans Wikipédia, vous savez. »

Lorgnant la bande de Galurins Verts, je me dis qu’ils feraient l’affaire, rayon suspects. Là, il me faudrait les isoler, histoire qu’ils se concertent pas. Enfin, pas plus qu’ils ne l’avaient déjà fait, je veux dire. « Il y aurait moyen d’enfermer tous ces zozos séparément, histoire que je leur cause ? »

« Aucun problème, » dit-elle. ‘Pinwheel’ s’approcha du bouton rouge et appuya dessus. Les murs de la Suite des Modérateurs se mirent à se déplier, séparant les Chapeaux Verts. Certains en eurent l’air étonné. D’autres juste l’air agaçé.

« C’est pas un truc de mauviette, ce bouton rouge, dis donc ! »

[Rock Lobster]

Je m’accordai un moment de réflexion sur la façon de procéder. En gros il y avait une petite dizaine de Chapeaux Verts au bout de la pièce. Et ‘Pinwheel’. C’était pas parce qu’elle allongeait la galette qu’elle était blanche comme neige. Je connaissais la musique.

Je la regardai. « Ils s’appellent comment, les lascars ? »

« Leurs noms sont sur les portes. »

Jetant un coup d’œil, je voyais le sus-mentionné Nate the Great, PilotBob, Verencat, Patricia, mtravellerh, NatCh, DaleDe, Nekokami, Ravenne, et Netseeker.

« Drôles de noms. »

« Ce sont tous des pseudo. Sauf pour Nate. On est à peu près sûr qu’il s’appelle réellement ‘Great’. »

« ‘Patricia’ ? »

Re-belote avec le roulement des yeux. « C’est pas évident ? » elle demanda.

Je sortis mon carnet et feuilletai mon carnet jusqu'à ce que les croquis de robots déprimés cèdent la place à une page vierge.

Je décidai de prendre au petit bonheur. Qui sait ? Je pourrais tomber sur le meurtrier et rentrer à temps pour mater NCIS à la télé.

Je passai la porte la plus proche et tombai sur un type louche avec un chapeau mou. La porte indiquait « Netseeker ».

« Vous êtes Netseeker ? »

« Ja ! »

« Allemand ? »

« Possible. »

« Faites pas le mariole. Pourquoi vous avez tué pshrynk ? » Qui ne tente rien…

« Il me semblait qu’il devait mourir. »

Qui l’eût cru ? Peut-être qu’il y aurait un épisode avec Ziva ce soir. « Pourquoi il devait mourir ? »

« Tout le monde meurt… tôt ou tard. »

Je commençais à avoir des doutes. « Alors, comment vous y êtes-vous pris ? »

« Poison. J’utilise toujours du poison. C’est la meilleure façon, en fait. »

« Alors, c’est pas votre premier coup ? »

« Loin de là. Un vrai tueur en série, que je suis. Au moins cinquante à mon ardoise. Non, c’est faux, cinquante-trois ! Il faut compter deux fois le boulanger de Prague ! »

Je laissai les mathématiques de cet aveu pour un autre jour. Ce type était visiblement un maniaque de la confesse. « Vous aviez de l’aide ? »

« Ben, le type au nook m’a peut-être un peu aidé… »

« Ça fait donc que cinquante-deux et demi, si on compte bien ? »

« Mince ! »

[Rock Lobster]

Je laissai le confesseur chronique en train de détailler les cinquante empoisonnements (et des brouettes) qu’il avait à son actif et passai à la porte d’après. « Nekokami » disait la pancarte. Je regardai ‘Pinwheel’.

« Ça risque pas d’être elle le meurtrier. Elle est pacifiste. Violemment opposée à la violence, en fait. »

« Voyons donc ce qu’elle a vu, alors. » Je poussai la porte et découvris un chat à l’apparence étrangement porcelaine. Perchée sur un sofa, elle tapait furieusement sur un ordinateur portable.

« Exposé de 5 pages, sacrée patte poilue ! Impossible d’écrire moins d’une vingtaine ! »

Je toussai discrètement. Puis plus fort, vu qu’elle bougeait pas.

« Oui ? Je peux vous aider ? Vous voulez acheter un t-shirt ? »

« Pas aujourd’hui. Je voudrais vous poser quelques questions sur la victime du meurtre, à côté. Vous étiez où, au moment des faits ? »

Le chat cligna des yeux et regarda un peu autour d’elle. « Il y a eu un meurtre ? »

« Il y a environ trois heures. Un bonhomme du nom de pshrynk. Vous le connaissiez ? »

« Évidemment ; tout le monde le connaît. Une espèce d’écrivaillon qui facture toujours le prix fort pour des conseils banals. 300$ mes fesses ! Je crois bien que m’en serais remise toute seule ! »

« Il avait des ennemis ? » Je demandai. Je notai le détail des 300$ avec mon stylo LiveScribe. Il me servait bien plus depuis qu’on trouvait des carnets de poche.

« Oh, je crois que personne n’a réellement d’ennemi. Il s’agît tout juste de malentendus qui n’ont pas encore été résolu. »

Je me grattais la tête à cette idée. Je comptais quelques mecs en prison que j’étais à peu près sûr d’avoir parfaitement compris, qui ne demandaient pas mieux que de me faire la peau.

« C’était vous ? » Je demandai encore. Ça marcherait bien un jour quand même.

« Ciel, non ! Je suis absolument opposée à la violence. » Elle se mit à faire sa toilette à petits coups de langue nerveux.

« Vous êtes sûre ? »

« MAIS BON DIEU, JE SUIS QUAKER, ESPÈCE D’IMBÉCILE ! Zut, grillée ! » elle sauta à terre et enfonça la tête dans un sac en papier.

« Ha, bien joué, » ronchonna ‘Pinwheel’. « Maintenant on va tous devoir chanter ‘In Ancient Times’. Encore. »

Je notai sur mon calepin que nekokami n’était probablement pas le coupable. Quoiqu’il y avait bien un bout de ficelle sur le sofa qui ressemblait pas mal au tissu de la veste du refroidi.

[Rock Lobster]

Je laissai nekokami dans sa chambre et jetai un coup d’oeil circulaire. Le refroidi était toujours aussi froid. La pince était toujours propre. Il faudrait bosser pour trouver un sens à tout ça. Un peu comme essayer de piger le fonctionnement du métro à New York.

La porte d’à côté portait le nom de mtravellerh. Je jetai un œil à ‘Pinwheel’ et haussa un sourcil. Ça me sert des fois de pouvoir faire ça, lorsque j’interroge les suspects. Elle roula les yeux de nouveau. À nous deux on aurait les deux fronts les mieux musclés de la place.

« Ça vous irait si je vous appelle ‘Zippy’, histoire de me calmer avec les guillemets ? » je demandai.

« Aucun problème, » dit-elle.

« Alors, c’est qui le bonhomme suivant ? »

« MTH. À ne pas confondre avec ‘M to the H’, c’est encore toute une histoire. »

« La confusion, ça me connaît, soeurette, » je répliquai. J’ouvris la porte et entrai. MTH se tenait sur une chaise précisément au centre de la pièce, tripotant une grosse boussole qui reposait sur ses genoux. Ça me rappelait étrangement le gros chat blanc des films d'espionnage les plus ringards.

« Mais quelle agréable visite, Mister Lobster, » dit-il.

« Agréable pour vous, ou pour moi ? » je demandai.

« Sans doute un peu des deux. Si on s’y mettait ? Posez-moi vos questions, je vous donnerai mes réponses vagues et trompeuses, qu’on en finisse. J’ai un emploi du temps chargé. »

« Ha bon ? Alors commençons par l'endroit où vous vous trouviez au moment du meurtre. »

« Je me trouvais ici. Ou plutôt, là-bas, enfin à l’endroit qui était là avant que Zelda tape sur le Gros Bouton Rouge. Ça devient lassant, des fois, franchement, tout ce trans-positionnement spatio-temporel. »

Je reconnais que je suivais pas tout, là. Mais j’affichais une mine inscrutable, l’air de celui qui tombe pas de la dernière pluie. « Et que faisiez vous ici ou là-bas ? »

« Je modérais. C’est ce qu’on fait, nous, les Chapeaux Verts. Nous modérons. » Il avait l’air content de lui.

« Un truc précis ? »

« Il y a un fil au sujet d’une nouvelle liseuse qui s’échauffait. Je gardais un œil sur les trolls potentiels. »

« Vous avez vu ce qui est arrivé à pshrynk ? » On tournait en rond là, je passai aux choses sérieuses.

« Ho oui. C’est atroce. J’espère vraiment qu’on va pouvoir nettoyer ce tapis. »

« Vous êtes donc témoin oculaire ? Que s’est-il passé ? »

« Eh bien, à le voir, on dirait qu’on l’a frappé avec une pince-monseigneur. »

Je commençais à regretter de ne pas posséder le talent de Zippy pour le roulement des yeux. « Je veux dire avant qu’on salope votre tapis. Vous avez vu qui l’a fait ? »

« Ha, je pensais que vous vouliez dire, si je savais ce qui lui était arrivé, le pauvre. Non, je dois déclarer que je n'ai pas vu qui a commis ce crime atroce, je suis catégorique là-dessus. J’étais occupé avec une nouvelle liseuse à ce moment-là. »

« Vous ne regardiez rien d’autre ? »

« Rien du tout. »

« Tiens… »

« Qu’est-ce que je dois tenir ? »

Je commençais à en avoir soupé de cette conversation. Il m’aidait pas pour un sou. « Vous avez quoi que ce soit d’utile à me communiquer ? »

« Hé bien, il se trouve que j’ai vu un pingouin se diriger en courant vers cette partie de la suite juste avant tout ce tapage. »

« Merci d’avoir répondu si extemporanément. Vous avez été tout à fait séditieux. »

« Le plaisir était tout pour moi. » MTH retourna à son clavier et se remit à taper.

Jetant un œil dans la pièce, je remarquai un bout de ficelle assorti à la veste de pshrynk, jeté négligemment dans un coin.

[Rock Lobster]

En quittant la pièce, je regardai Zippy et dis, « Au fait, vous étiez où quand tout ça se passait ? »

« Vous ne pouvez pas vous imaginer que j’étais impliquée dans cet horrible crime ? » elle réussit à avoir l’air à la fois offensée et artistique. Ça devait être le béret.

« Je suis capable de m’imaginer que n’importe qui peut être impliqué, Poupée. C’est mon métier, et j’y suis plutôt doué. Alors, aboulez, excuse ou alibi ! »

Elle renifla de façon indignée et dit d’une voix légère, « Je dormais, si vous tenez à le savoir. J'habite pas le même fuseau horaire que les autres ici. »

« Je me rends compte. Alors, vous avez vu ou entendu quelque chose d’anormal ? »

« Plus anormal qu’un cadavre par terre en plein milieu de la Suite ? »

Je commençais à me lasser un peu de l’esprit littéral de ces zozos. « À part ça, alors. »

« Eh bien, pshrynk ne portait jamais de veston. Il avait davantage d’avatars que n’importe qui, mais un veston, ça n’y figurait pas. »

Je jetais un œil au cané. Il portait un veston tapageur à carreaux bleu et jaune. Sa cravate était d’un orange terne.

« Il était daltonien ? »

« Assurément. Pour lui, c’était subtil, ça. »

« Il y a quelqu’un qui savait que vous dormiez ? »

Elle esquiva mon regard. « Tout le monde sait que j’ai des horaires très réguliers. Tôt couchée, tôt levée, tout ça… »

« Je vois. Bien, dîtes-moi, pourquoi vous avez un fil bleu électrique à l’épaule ? Ça va pas du tout avec votre ensemble noir. »

L’air de rien elle vira la ficelle d’un revers de main. « Quel fil ? » dit-elle, me fixant de ses grands yeux innocents.

« C’est ça, ouais ! » je dis. Je m’approchai d’un autre mur. Il s’y trouvait quatre liseuses sous verre. En dessous de chacune se trouvait un petit marteau, et la consigne, « En cas d’urgence, brisez le verre. » L’un des verres était fêlé.

« C’est quoi, ça, donc ? » demandai-je, en espérant la prendre en défaut plus tard.

« Ça ? Pfff ! Rien du tout ! »

« Du ‘rien’ sous verre en cas d’urgence, hein ? Tu parles d’une boîte de gogols. »

[Rock Lobster]

Je m’approchai pour examiner les vitrines. Deux d’entre-elles contenaient des EZ Reader Pro de chez Astak, les deux autres contenaient des PocketBook 302.

« Bien… ces petits bouts de ‘rien’, là. Pourquoi les mettre sous verre ? »

« Il faudrait demander à Ravenne. C’était son idée de les y mettre. » Zippy faisait encore un peu la tête, je n’ai donc pas insisté.

Je traversai la pièce et passai la porte marquée « Ravenne ». À l’intérieur, les murs étaient couverts de graffiti. Vu qu’ils n’existaient que depuis quelques minutes, j’étais pas mal épaté. Au milieu de la pièce, une bonnefemme de neige tenait un roquet gris miteux par le collier.

« Vilain ! On ne vole pas les avatars des autres ! » Le chien s’esquiva, les yeux plein de remords. « Ça fera long feu, » dit-elle.

« Vous êtes Ravenne ? » je demandai.

« Oui. Et vous êtes… ? »

« Lobster. Rock Lobster, Privé. Racontez-moi un peu ce meurtre. Par exemple, c’est vous qui l’avez fait ? » Je me disais qu’il n’y aurait qu’un seul confesseur timbré dans le lot, et que je pourrais peut-être rentrer à temps de regarder NCIS après tout.

« Non. »

J’attendis un peu. Puis, lorsqu’il devint évident que sa réponse serait brève et peu utile, « ‘Non’, c’est-à-dire, ‘Non, vous ne raconterez rien,’ ou ‘Non, c’était pas vous’ ? »

« C’est-à-dire les deux. J’étais occupée à monter le prochain jeu concours pour nos membres. Ça prend tout mon temps, de chercher des trucs sournois et tordus. »

« C’est pas tout naturel dans vot’ cas, hein ? »

« Vous seriez étonné combien il faut bosser parfois pour bien le faire. »

« C’est quoi ces liseuse bidules dans les vitrines, là, dehors ? »

« Ce sont les prix pour le jeu. »

« Et les marteaux et les plaques, c’est pourquoi ? »

« Si, par un accident quelconque, l’un des membres devinait la bonne réponse, nous serions obligés de briser le verre et donner la liseuse. C’est pour cela que ça serait un cas d’urgence. »

Je me grattais le menton un peu, réfléchissant à l’esprit de cette Ravenne. « Alors, pourquoi les mettre sous verre pour commencer ? Pourquoi ne pas juste les flanquer dans un tiroir en attendant de les donner ? »

Ravenne eut un frisson à l’idée de distribuer les prix. « Vous ne comprenez pas. Il y en a qui aiment bien voler des trucs, par ici. Hein, le chien ! C’est à toi que je parle ! »

La queue basse, le chien se carapata.

« Une dernière question : c’est quoi ce fil bleu collé au bas de votre boule de neige ? »

Suivant mon regard, elle essaya de se débarrasser de la ficelle. « J’imagine que c’est en rapport avec la Théorie des Cordes de Nate. Faudrait voir avec lui. »

Comme je m’éloignai, elle attrapa sa bombe de peinture et attaqua les murs de nouveau.

[Rock Lobster]

De retour dans la pièce principale, j’examinai de nouveau les vitrines au mur. Il y avait un petit creux derrière celle au verre fêlé. Je fis rapidement un croquis dans mon carnet et continuai mon chemin. La prochaine pièce portait le nom « Verencat. »

Après avoir frappé pendant environ deux minutes, je poussai moi-même la porte. Je découvris un gros fauteuil moelleux. Dans le fauteuil, un chat. Un chat sans os, apparemment. Couchée sur le dos, elle semblait dégouliner le long des coussins.

« Quoi ?! » dit-elle.

« Z’êtes Verencat ? » je demandai.

« Parfois. »

« Et le reste du temps ? » Ces ahuris commençaient à me donner de l’urticaire.

« Dodo. »

« Vous pouvez me dire ce qui s’est passé avec ce type, pshrynk ? »

« Ouais. »

Je commençais à piger. Je tâtai un peu l’idée de poser des questions d’un seul mot, mais c’est pas mon genre.

« C’était qui, les autres présents dans la pièce lorsque le toubib a eu sa physionomie retravaillé ? » et vas-y, qu’elle réponde donc à ça en un mot.

« Modérateurs. » Merde !

« Lesquels ? »

Le chat leva les yeux au plafond comme si elle y cherchait une inspiration. « Chais pas. »

« Vous savez que ça fait deux mots, là. » Elle prit un petit air embêté et dégoulina un peu plus bas. « Bon, je vous facilite la tâche. Il y avait combien de modérateurs présents, sans compter le refroidi, au moment où on l’a refroidi ? »

«Dix. » Content, le matou, là.

« Vous avez vu le meurtre ? »

« Non. »

« Quelqu’un d’autre aurait vu le meurtre ? »

Une pause. « ça… » Elle haussa mollement les épaules. Visiblement elle tenait à éviter le piège de “chais pas”.

« Qui a pu voir le meurtre ? » ça commençait à me fatiguer, de faire les questions et les réponses.

« Pingouin. »

« Un pingouin domestiqué ? comme un chien ? »

« Nan. »

Ça n’allait nulle part. Il était temps de remballer. « Bien, qu’est-ce que vous savez de cette ficelle qui traîne partout aujourd’hui ? »

« Ficelle ? Vous avez dit ficelle ? Ouais ! Ficelle !! À moi la ficelle ! Elle est où la ficelle ?! Ficelle ! Ficelle !! Donnedonnedonnedonnedonne !!!! »

Le chat sembla brusquement se faire pousser un squelette et décolla d’un coup, bondissant dans tous les sens après un bout de ficelle bleu électrique accroché à sa queue. Je me jetais par la porte pour éviter de me retrouver emmêlé dans sa frénésie filaire.

« Bizarre, » j’ai dit.

« Faudrait la voir avec un pointeur laser, » dit Zippy.

[Rock Lobster]

La porte d’après était celle de ‘Patricia’. Je me méfiais désormais de ceux qui utilisaient leurs vrais noms. Ça me disait rien qui vaille. Frappant un coup sec, j’entrai et regardai autour de moi. Une femme qui portait ce qui devait être des habits de l’antiquité grecque tapait furieusement à un ordinateur portable. Elle marmonnait, « Plus vite ! Faut pas traîner ! Il va me rattraper ! »

« Bonjour, madame, » dis-je quand je compris que Patricia ne me remarquerait pas toute seule.

Elle fit une pause et leva les yeux. « Je n’ai pas tout mon temps. Qu’est-ce qu’il vous fallait ? »

« Vous avez remarqué qu’il y a eu un meurtre dans la Suite des Modérateurs ? » je me disais qu’avec celle-là, fallait commencer par le commencement. Elle avait l’air un peu à l'ouest.

« Mais, bien sûr ! C’est affreux. Ça m’a dérangée en plein travail de formattage de trois ebooks. Quelle inconscience. »

« Vous parlez du tueur, ou de la victime ? »

« Eh bien, les deux, en fait. Il ne peut y avoir de criminel en l’absence d’une victime. C’est de la logique élémentaire, ça. J’ai été obligée de pousser mon fauteuil depuis mon coin préféré jusque… » Elle regarda autour d’elle comme si elle remarqua pour la première fois ses alentours. « Est-ce que pshrynk a tapé sur le Bouton Rouge ? Encore ? »

« Il en faisait une habitude, donc ? »

« Cela ne s’est produit qu’une fois, ensuite nous avons fait la règle Numéro Sept : ‘Défense d’appuyer ! T'as compris, pshrynk ?!’ »

En fait c’est Zippy qui a appuyé dessus.

« Zippy ? »

« Celle qui se fait appeler ‘Pinwheel’. » Je roulais les yeux. Comme si ça pouvait être son vrai nom.

« Ah, Zelda. Ça n’est pas possible ! Zelda ne toucherait jamais au Bouton Rouge ! Et puis, elle dormait trop bien, lorsque tout ça s’est produit. »

« Elle dormait, hein ? Et vous donc ? Vous faisiez quoi ? »

« Je me cassais la tête sur un pdf particulièrement difficile. J’étais bien trop occupée pour remarquer quoi que ce soit. »

« Et vous avez pourtant remarqué que Zippy dormait ? »

« C’est tellement rare qu’il était difficile de faire autrement. »

« Une dernière chose. Pourquoi est-ce qu’il y a un bout de ficelle bleue collé au bas de votre, heu, toge ? »

Elle jeta un coup d’œil et attrapa la ficelle. « J’imagine que c’est lié à la Théorie des Cordes de Nate… »

Elle dirigea son regard vers son ordinateur et je savais que je l’avais perdu. Je retournai à la porte où je retrouvai Zippy.

« Bon, parlez-moi de ce gros dodo, Poupée ! » La surprise lui coupa le souffle.

[Rock Lobster]

Zippy resta figée un moment puis se mit à grommeler. J’en saisis quelques bribes qu’aucun prof de français ne m’aurait enseigné. Puis, me regardant, elle dit « Oui, j’ai dormi. Et alors ? Tout le monde dort. Ça n’est pas un signe de faiblesse. Vraiment. Pas du tout. »

« Si ça n’est pas un signe de faiblesse, pourquoi vous avez prétendu tout à l’heure dormir de bonne heure tous les jours ? »

« J’ai ma réputation, moi ! »

« Si vous dormiez, vous n’avez aucune idée de ce qui s’est passé, alors ? »

« J’ai fait des cauchemars bizarres d’une pince-monseigneur… »

Juste là, un fracas retentissant me fit sursauter. Je courus voir ce qui se passait. « NatCh » j’ai lu sur la porte. L’ouvrant avec précaution, je pointai le bout de mon nez.

« Ne vous en faites pas, » dit l’occupant, « Je me suis juste trop dilaté la rate, et elle a éclaté. Pas grave, j’en ai tout un stock. »

« Vous en éclatez beaucoup, des rates ? » Je jetai un coup d’œil circulaire, pour la ficelle. Et tiens, la voilà, en plein milieu des éclats de verre par terre. Sortant mon carnet je me mis à prendre des notes.

« Ben, c’est qu’elle est pas mal fragile, la chose. Et par ici, ça se dilate tout le temps. C’est bien pour ça que pour les remplacements, j’en achète en gros. J’en ai commandé chez Montsnmags Enterprises. Elles étaient pas chères, mais j’ai pas bien saisi toute la portée de la clause qui parlait de ‘la dixième part de votre âme’… » Une ombre de souci passa sur son visage.

« Qu’est-ce que vous pouvez me dire au sujet du meurtre ? » J’abandonnai l’idée de voir NCIS ce soir. J’espérai que c’était un épisode avec Kate et sans McGee.

« Ben, il y avait du mauvais sang dans l’histoire. »

« Du mauvais sang ? » je demandai. L’espoir prit son envol avec un petit frisson…

« Oui. Une fois qu’il sort du corps, il n’est plus bon à rien sauf à tacher des trucs. » …et s’écrasa par terre dans une boule de feu.

« Il y avait quelqu’un qui lui en voulait, à ce type pshrynk ? »

« Hé bien, il semblait très jaloux de ceux qui avaient de nouveaux jouets. Il harcelait Alex pour qu’il change les règles du jeu, pour que les modérateurs puissent gagner à condition qu’ils soient psychiatre habitant une région au climat glacial. »

« Et ça plaisait pas aux autres ? »

« Je ne crois pas qu’il l’ait remarqué. Il pouvait vraiment être lourd, des fois. »

Je luttais contre l’envie de fracasser la nouvelle rate que cet animal était en train d’installer au-dessus de sa tête. « Il y avait quelqu’un de précis qui aurait pu vouloir lui flanquer un coup de pince-monseigneur, puis essuyer la pince et laisser un nook cassé ? »

« Puisque vous êtes rentré dans autant de détail, je dois dire que non. Il n’y avait personne qui pouvait faire tout ça. »

Ces cocos jouaient bien trop avec les mots pour mon goût. Je notai ce qu’il m’avait dit et me mis à dessiner des boucles et des gribouillis pour relier le tout.

[Rock Lobster]

Je commençais à me fatiguer de tout ce cirque. Un paquet d’histoires à la noix, et zéro écureuils. Personne ne m’avait encore parlé du bout de papier jaune avec l’étoile et le Q, et quant au rôle des liseuses au mur, mystère. Cela dit, on me paie pour résoudre des mystères, alors faudrait peut-être pas que je râle.

La porte d’après était marqué « DaleDe ». Je me demandais comment il serait. Ouvrant la porte, je vis un type habillé d’un jean et d’un t-shirt, avec un scanneur à la main. Il scannait un code-barres au mur. Son t-shirt portait la légende, « Well, we did buy a llama for neko » (« Après tout, on a bien acheté un llama pour neko. »).

« Vous êtes DaleDe ? » Je demandai.

« C’est bien moi ! Ne bougez pas, je prends votre photo pour le wiki ! » Il sortit un appareil photo et m’éblouit avec le flash. Tandis que je clignais les yeux en espérant chasser les tâches violettes qui me brouillaient la vue, il sortit un calepin et dit, « Racontez-moi l’histoire de votre vie et surtout tout ce que vous savez au sujet des liseuses. »

« Dîtes-donc, Môssieu, c’est moi qui pose les questions ici ! »

Il griffonna furieusement dans son calepin. « Détective privé, dur à cuire… » il marmonna.

« Écoutez, mon pote, il y a eu un meurtre dans la Suite des Modérateurs, et je vais tirer tout ça au clair. » J’avais l’impression de régresser.

« Noir… » il murmura.

« Qu’est-ce que vous pouvez me dire au sujet de ce papelard jaune avec un Q dans une étoile dessus ? »

Il leva les yeux au ciel comme si il récitait de mémoire. « L’étoile avec une lettre dedans a été utilisé sur MobileRead pour la première fois par Ravenne, modératrice allemande [réf. nécessaire] dans le Grand Jeu d’Hiver 2009. Diverses étoiles et lettres ont été disséminées dans les forums de manière aléatoire pour encourager les visiteurs de sortir de leurs forums habituels. Les lettres, une fois démêlées, écrivaient « Oliver Twist », ce qui était la bonne réponse nécessaire pour participer au tirage au sort. [réf. nécessaire] Plusieurs membres ont frôlé l’émeute lorsque Ravenne a désactivé les méthodes de recherche automatique pour les étoiles. pshrynk a tenté d’embrouiller l’affaire en affichant une étoile portant la lettre Q comme avatar. Cela n’a amusé personne. [réf. nécessaire] La première personne a trouver la bonne réponse était WetDogEared, qui l’a trouvé à la deuxième lettre. Ses pouvoirs de déduction ont effrayé les modérateurs mais le jeu a continué. Nous supposons que WDE connaît déjà la réponse au jeu en cours. »

Ça tombait bien que j’avais mon stylo qui fait dictaphone là. « Donc, ce pshrynk était un rigolo comme ça ? » il me tardait de trouver un mobile pour donner un sens à tout ça.

Et re-belote avec la récitation style écolier. « pshrynk est un modérateur du Wisconsin, un état des États-Unis qui ne connaît apparemment jamais l’été. [réf. nécessaire] Il est connu pour ses changements fréquents d’avatar et ses tentatives peu mémorables d’écriture qui ne sont tolérées que parce qu’il a le pouvoir de bannir toute personne qu’il considère comme étant ‘excessivement critique’. On le soupçonne d’être l’instigateur des fréquents vols d’avatars perpétrés par VivaldiRules. [réf. nécessaire] Il est également l’employeur d’un membre jouissant d’une adoration débridée, psockpuppet, qu’il oblige à travailler sans relâche et sans compensation. Voir aussi « Laddy at the door » (garçon à la porte), une facturation complètement exorbitante, et La Question de la Semaine du vendredi. »

La tête commençait à me tourner d’une intoxication à l'information. « Bon. En une phrase ou moins, pourquoi quelqu’un voudrait descendre pshrynk ? »

« À mon avis, c’était une histoire de jalousie. Maintenant, si ça ne vous embête pas, j’ai l’histoire du karma à MobileRead à écrire et à poster dans le wiki. » Il retourna à ses scans et je sus que l’entretien était fini.

Sortant de la pièce, je vis Zippy astiquant les vitrines d’un air absent. Netseeker avait réussi à s’évader de sa boîte à piqués personnelle et la régalait des détails de ses crimes atroces, commis principalement à l’aide du poison, mais parfois à la pince-monseigneur bien propre, puisque les indices allaient tous dans ce sens.

[Rock Lobster]

Je secouai la tête et marchai jusqu’à la porte suivante. Elle était marquée « Nate the Great ». Dessous il y avait, écrit à la main, une pancarte qui disait : « Bonjour. Je ne peux pas recevoir votre visite pour l’instant, mais vous pouvez imprimer votre présence dans l’holocube au son du timbre et je l’ignorerai à loisir. Biiip »

« Il est toujours avenant comme ça? » J’ai demandé à Zippy.

« Seulement quand il est de bonne humeur. On essaie de ne pas le déranger quand il achète un nouveau gadget qui ne fait pas l'affaire. »

J’ai regardé autour pour un cube, mais j’ai seulement vu un petit tas de fils avec un papier jaune collé dessus, marqué « holocube ». J’ai levé un sourcil à Zippy.

« Les holocubes n’ont pas trouvé leur place sur sa liste. »

J’ai ouvert la porte et j’ai tout de suite eu l’impression d’être transporté sur le plateau d’un film de Star Truc (TM). Celui avec les robots. La pièce était bourrée d’équipement électronique jusqu’au plafond. Au milieu de la masse de plastique et de métal chuintante et sifflante se trouvait l’oiseau avec les gros yeux que j’avais vu plus tôt. Il était occupé à tirer sur le bout d’un long fil.

« ‘Z’êtes Nate? » J’ai demandé.

« Oui. Tenez ça. » il m’a dit en me tendant le fil. Il marcha jusqu’à un panneau et tapa furieusement sur des boutons. Je lâchai le fil juste à temps pour éviter la vague de courant électrique qui se jetait sur moi à partir de l’autre bout de la balle de fil. « Bons réflexes. Qu’est-ce que je peux faire pour vous? »

En m’essuyant les mains sur mon froc je lui demandai « Vous savez quelque chose sur le meurtre commis un peu plus tôt aujourd’hui? »

« J’ai compris que pshrynk en a reçu un sur le crâne. Sale affaire. Mais bon, il ne savait pas grand chose de l’électronique. » L’oiseau haussa les épaules, il fallait le voir.

« Par hasard, vous sauriez pas qui l’a tué, non? »

« Ben, il était psychiatre. Je parie sur le suicide. Les statistiques sont plutôt élevées dans ce sens. Allez, tenez ce clavier pendant que je les vérifie. »

J’évitai de toucher l’arme offerte et dis : « J’vous crois sur parole. Donc vous pensez que quelqu’un peut se flanquer un coup de pince-monseigneur sur la tabatière histoire de rendre l'âme avant l'heure? »

« Il a fait des choses plus étranges. Avez-vous lu ses histoires? »

« Les contes récursifs ne sont pas mon truc. Bon, qu’est-ce que vous pouvez me dire à propos des fils qui traînent partout ici? Tout le monde me dit que vous pouvez tout m’expliquer. »

« Ça, c’est ma « théorie des Cordes ». » L’oiseau réussi à prendre l’air fier, malgré les yeux.

« Théorie des cordes ?»

« Non, Théorie des Cordes. Ça prend la majuscule. »

« Ouais. Donc c’est quoi, cette théorie des cordes que vous avez? »

« Tout est tenu par des cordes. »

« Et? » Je dois admettre qu’à ce moment, j’avais l’impression que ma tête aurait profité d’être attachée par quelques cordes, pour éviter qu’elle ne tourne.

« C’est tout. Ça relie tout ensemble. Plus complexe que ça, ça devient trop facile à réfuter. Par exemple comme ma théorie du Big Bang Avec Quelques Explosions en Forme de Fleur Juste Pour Rendre le Tout Plus Intéressant et Çà et Là une Traînée d'Étincelles. Laissez-moi vous dire que celle-là est partie en couille plus vite que n’importe quoi. »

« Alors, ça doit être rassurant d'avoir cerné l'autre, si je puis dire.»

L’oiseau roula les yeux, définitivement un truc à voir.

« Donc, à l’exception de la possibilité que pshrynk se soit tué, y’a quelqu’un d’autre qui peut avoir été impliqué? »

« Le mec qui trimbale tout le temps une boussole et le pingouin étaient tout les deux dans la pièce, aussi. Maintenant, si vous permettez, je dois commencer à travailler sur ma "Théorie des Relations". Au fait, il n'y aurait pas quelqu'un de vos relations dans une distorsion spatio-temporelle, actuellement ?? »

Derrière moi, Zippy perdit le souffle. Encore.